Armors

Jeanne Vicerial

En 2021, les Magasins Généraux lui avaient consacré sa première exposition d’envergure, curatée par Anna Labouze & Keimis Henni, directeurs associés des Magasins, et intitulée Clinique vestimentaire, du nom de son studio de recherche et de création.
L’artiste (née en 1991) vient d’intégrer la galerie Templon où elle présente son premier solo. Entre l’art, la science, la mode et le design, Jeanne Vicerial ne choisit pas. Mais ce show spectaculaire, où l’on retrouve son univers de référence, évoquant aussi bien la statuaire médiévale qu’un manga futuriste, met davantage en exergue la dimension sculpturale de ses pièces vestimentaires, qui sont ici soclées. En s’attardant moins sur leur confection que sur les représentations cérémonielles du corps auxquelles elles renvoient, de la toilette féminine à l’embaumement.
On retrouvera d’ailleurs les Madones erratiques de Jeanne Vicerial à partir du 14 février dans Au-delà, Rituels pour un monde nouveau, exposition de groupe organisée par Lafayette Anticipations – Fondation Galeries Lafayette.

Templon
Jusqu’au 11 mars

 

Moi-même faute de mieux
Expo inaugurale

Fondée en 2008, la galerie Alberta Pane est implantée à Venise et à Paris, où elle ouvre en ce début d’année un nouvel espace. Pour inaugurer ce dernier, elle a imaginé un dialogue entre l’œuvre énigmatique de Claude Cahun (1894-1954) et les artistes contemporains qu’elle promeut, qui ont en commun une démarche volontiers conceptuelle. Alors que l’on redécouvre le travail de Claude Cahun (exposé notamment dans le cadre des dernières éditions des biennales de Venise et de Sao Paulo, ainsi que par la Collection Pinault à la Pointe de la Douane (Dancing with myself, 2018 ), l’exposition souligne l’actualité des thèmes abordés, à travers ses autoportraits travestis, par cette plasticienne proche des Surréalistes. Des correspondances s’établissent ainsi à travers le temps, que ce soit avec les métamorphoses de Marie Denis ou les dessins teintés de trouble de João Vilhena.

Alberta Pane, 44 rue de Montmorency 75003 Paris
Jusqu’au 4 mars

 

The Minotaur’s Daydream
Exposition de groupe conçue par Anthony Cudahy

Depuis longtemps, Anthony Cudahy (né en 1989) abreuvait sa galerie parisienne d’informations sur sa famille artistique, toutes générations confondues, des toiles aux accents psychédéliques de Drew Dodge (né en 2001), le cadet, aux portraits photos intimistes de Billy Sullivan (né en 1946), présent dans les grandes collections publiques.
Avec cette exposition, le peintre basé à New York choisit donc de mettre en lumière ses affinités électives, dans un dédale qui transforme l’espace d’accrochage en un petit musée de la scène new yorkaise contemporaine.
C’est l’occasion de découvrir notamment l’œuvre peinte de Philemona Williamson (née en 1951), quasi inconnue, dont plusieurs tableaux sont présentés. Les poupées qui les hantent rappelleront à ceux qui l’ont vue l’exposition Black Dolls organisée par la Maison Rouge en 2018.
Quant à Antony Cudahy, il faudra attendre le printemps pour le retrouver, cette fois-ci en « Conversation » avec les collections du musée des beaux-arts de Dole (du 28 avril au 10 septembre 2023).

Semiose
Jusqu’au 4 mars
 

Never ending story
Mathilde Denize

Comme celle de Jeanne Vicerial, l’exposition de Mathilde Denize entretient des liens avec l’histoire du vêtement – l’artiste parle d’ailleurs à propos de ses œuvres de « costumes de peinture ». Autant dire qu’il ne s’agit de les revêtir que par la pensée, ou pour une cérémonie très spéciale et sans doute secrète. Elle a réalisé ces sculptures en démontant et en découpant des toiles qu’elle jugeait inabouties, leur offrant une nouvelle vie.
La composition, de formes et de couleurs, qui est alors apparue lui a inspiré de nouveaux tableaux, dans un éternel recommencement semblable aux cycles de la vie et de la création. Les objets de rebus glanés qui unissent la toile à patron de la couturière et la toile du peintre, la palette de teintes pastels, les effets de transparence et les repentis apparents, tout cela suggère avec grâce une forme de fragilité et de nostalgie, comme le souvenir de fêtes évanouies.

Perrotin
Jusqu’au 11 mars

 

Sculpture
John Chamberlain

Cette exposition consacrée à l’un des grands artistes américains du XXème siècle offre d’embrasser quarante ans de sa création à travers quelques-unes de ses œuvres iconiques.
Ses sculptures en acier peint, d’abord, caractéristiques du travail de John Chamberlain (1927-2011), qui faisait surgir par le pliage et l’assemblage, souvent à partir de rebuts de ferraille automobile, des modalités d’expression inconnues, en écho aux expérimentations picturales de Wilhem de Kooning ou de Jackson Pollock. La couleur domine – triomphe même – dans cette micro rétrospective qui présente également quelques monotypes du milieu des années 1980 où éclate la maîtrise de sa composition dans l’espace.
À même le mur, des vers de Charles Olson témoignent enfin de la complicité qui liait l’artiste à des poètes amis. Une plongée dans l’histoire récente de l’art, dans une autre époque.

Karsten Greve
Prolongée jusqu’au 18 février

 

Being Around
Kinke Kooi

On ne peut qu’avoir de la curiosité pour une artiste néerlandaise confidentielle qui s’avère faire partie des collections du Rijksmuseum et être un coup de cœur de Cédric Fauq (ce dernier signe le texte de présentation).
Accrochés sans cadre ni sous-verre, les dessins et collages de petit format de Kinke Kooi séduisent autant qu’ils agacent par leur délicatesse. Les courbes organiques, entre floral et génital, le rose chair, l’ambiguïté de formes dont on ne sait si elles sont terrestres ou aquatiques, les perles qui les ourlent, l’incongruité des objets en inserts, comme des cuillères en plastique, tout cela en effet intrigue et retient le regard. Un univers sensuel et onirique qui évite la mièvrerie par son côté obsessionnel et bizarre, mais aussi par sa façon lente de se révéler comme une image remontant à la surface.

Montassut
Jusqu’au 18 février

 

 

œuvres récentes
Djamel Tatah

Djamel Tatah expliquait récemment, en faisant visiter son exposition au musée Fabre, à Montpellier (Le théâtre du silence, jusqu’au 16 avril 2023), qu’un voyage en voiture, entre Paris et la Bourgogne sous la neige, lui avait inspiré un ensemble de tableaux où des corps flottent en suspension dans des espaces blancs, intervalle dans une démarche picturale rythmée par la couleur.
Les « œuvres récentes » présentées à la galerie Poggi déclinent ce même fond gris blanc mais les personnages figurés y sont cette fois debout. Le mystère de la peinture de Tatah consiste à donner l’impression qu’ils viennent de surgir ou qu’ils sont sur le point de disparaître. La toile se fait écran, espace de projection, cosa mentale. Ainsi de la silhouette de cet homme de trois quarts placée face au visiteur sur le mur du fond.
« On reconnaît parfaitement un ami disparu, à la position de ses mains, ce mouvement esquissé », remarquait avec émotion Anne Consigny le soir du vernissage. Le tableau montre l’homme en marche, saisi par le peintre au seuil de l’oubli.

Galerie Poggi
Jusqu’au 25 février