1. Raphaël Denis – Forschungen

📍 Galerie Sator, Komunuma

43 rue de la Commune de Paris, 93230 Romainville

Jusqu’au 20 juillet 2024

Pourquoi il faut y aller : Raphaël Denis s’intéresse aux œuvres spoliées par les nazis pendant la deuxième guerre mondiale et à la logistique de cette opération criminelle. Il part ici de l’épisode du train d’Aulnay, un convoi de 148 caisses d’œuvres d’art acheminé par l’Occupant et intercepté par l’Armée Leclerc. Le sujet, jusque dans sa relecture historique, n’a rien perdu de son actualité.

Ce qu’on y voit : un ensemble de caisses noires à échelle réduite, menuisé par l’artiste à partir de l’inventaire des œuvres établi au moment de leur récupération, un présentoir de cartes postales (La Loi normale des erreurs : Cartels) associant des reproductions de peintures et leur numéro d’inventaire sous l’Occupation, enfin des tableaux en trompe-l’œil évoquant la texture et le poids des bâches de camion de transport de marchandises. Tout un circuit se trouve ainsi suggéré, de la clandestinité au musée-symbole de la société de loisirs – de l’opacité de l’information aux flux des images.

On aime : le patient travail d’enquête préalable à ces installations conceptuelles qui au-delà de la reconstitution historique, invitent à s’interroger sur la notion de culture et de transmission.

2.  – Whatever This May Be

📍 Semiose

44 rue Quincampoix, Paris 4e

Jusqu’au 17 août 2024

Pourquoi il faut y aller : Laurent le Deunff est présent depuis une vingtaine d’années dans le paysage artistique français avec une discrétion et une constance qui suscitent autant la curiosité que l’admiration. Ses œuvres figurent notamment parmi les collections du Musée d’Art Moderne de Paris, du CAPC à Bordeaux ainsi que dans celles de plusieurs FRAC.

Ce qu’on y voit : Cette sixième exposition à la galerie réunit des sculptures, pour beaucoup d’entre elles animalières, d’autres reproduisant des pièges en ciment bricolés dans un esprit survivaliste. Les matériaux sont sans noblesse : l’artiste a appris la technique rustique de la rocaille, pratique la taille directe sur des bois quelconques et montre un talent certain à sculpter les coquilles de noix, montées sur socle à la façon de fétiches de culture prémodernes muséifiés. S’il opte pour l’albâtre précieux, c’est pour y façonner des répliques de jouets pour chiens en forme d’os. Les jeux d’échelles (massue monumentale, ours miniature…), et le décor immaculé façon Odyssée de l’espace de Kubrick, hésitant entre les présentoirs de musée et les codes de boutiques de luxe, renforcent le sentiment d’absurde.

On aime : « Homme blanc, cis et hétérosexuel » (ainsi que le rappelle la critique d’art Dorothée Dupuis dans la publication éditée par la galerie), Laurent Le Deunff développe un art qui n’a jamais été à la mode, en prise avec le faire et ancré dans la ruralité. S’il résonne si justement avec l’époque, c’est peut-être par sa façon de fuir l’esprit de sérieux, qui offre une échappatoire réjouissante à l’imaginaire.

Yuki Kimura
Time Paradox
1er juin — 25 juillet 2024
Galerie Chantal Crousel

 

3. Yuki Kimura  – Time Paradox

📍 Galerie Chantal Crousel

10 rue Charlot, Paris 3e

Jusqu’au 25 juillet 2024

Pourquoi il faut y aller : En dehors d’un accrochage collectif au frac île-de-france en 2012, c’est la première fois que le travail de cette artiste (née à Kyoto en 1971) est montré en France. On a pu le voir au MoMa à New York (2015) ou à la 30e Biennale de São Paulo, et le Kunstverein für die Rheinlande und Westfalen, à Düsseldorf, lui a consacré une exposition monographique en 2022. C’est son premier solo à la galerie Chantal Crousel. Une découverte, donc.

Ce qu’on y voit : L’espace de la galerie, baigné d’une lumière rouge, accueille deux installations au sol. La première est composée de plateaux ronds en acier argenté de tailles diverses formant une ellipse élégante. La seconde se déploie sur un tapis rectangulaire à même lequel sont posés des bols ronds aux reflets cuivrés, des sets de cuillères à mesurer ouverts en éventail, enfin trois bateaux à sushis en plastique translucide, à l’intérieur desquels clignotent faiblement des écrans. Dans l’entrée, des coquilles d’ormeaux pendent à la verticale, accrochés à une chaîne irisée de mousquetons.

On aime : À la façon des fréquences sonores imperceptibles, une poésie mystérieuse émane des rébus visuels de Yuki Kimura et s’adresse directement au cerveau. À défaut d’explication, le texte de salle livre cet indice : le titre de l’exposition (Time Paradox) renvoie au motif classique en science-fiction du voyage temporel et au nom (en néon rose) d’un restaurant actif à Kyoto dans les années 1980.

4. Jean Claracq – Une fictions

📍 Galerie Sultana

75 rue Beaubourg, Paris 3e

Jusqu’au 20 juillet 2024 

Pourquoi il faut y aller : Jean Claracq est l’un des jeunes peintres français les plus regardés : en 2021, il a bénéficié de deux solos shows à Paris, à la Fondation Louis Vuitton (dans le cadre de l’Open Space #7) et au musée Eugène Delacroix. En 2023 il a reçu le prix Pierre Cardin en peinture de l’Académie des Beaux-Arts.

Ce qu’on y voit : un ensemble de peintures de petites dimensions (à l’exception d’un tableau de format moyen) encadrées dans des caisses américaines également peintes, ainsi que des sculptures, nouvelles dans la pratique de l’artiste. Les toiles, certaines proches de la miniature, font se rencontrer des décors sans qualité (rond-point, hypermarché, intérieur impersonnel, parkings …) avec des références et des techniques empruntées à l’histoire de l’art (de l’antiquité à l’âge d’or néerlandais en passant par la Renaissance). Le trivial côtoie ainsi le sublime dans des télescopages inattendus, comme cette réplique du Torse de jeune homme (1919-1924) de Brancusi posée sur la forme d’un moule à gâteau, dans sa série de fontaines domestiques aux airs de Manneken-Pis (Monument).

On aime : cette façon d’observer et de peindre le monde dans son ambivalence en jouant avec des références savantes. Mais aussi la délicatesse du pinceau, la sensualité des couleurs et ces floutés qui parfois tendent tendrement vers l’abstraction (Blur More, 2024).

5. Trois, quatre. 

📍 galerie Jousse Entreprise

6 Rue Saint-Claude, Paris 3e

Jusqu’au 20 juillet 2024

Pourquoi il faut y aller : imaginé par la curatrice et critique d’art Anne Bourrassé, cette partition ternaire autour des œuvres de Clément Borderie, Victoire Inchauspé et Julia Rometti offre un passionnant dialogue intergénérationnel ponctué de silences. Une trêve dans la ville.

Ce qu’on y voit : les toiles imprégnées de temps et de lumière de Clément Borderie, les sculptures en bronze et les tableaux de cire de Victoire Inchauspé (sélectionnée par la prochaine édition de la Biennale de Lyon), les monochromes de Julia Rometti qui captent et réfléchissent les reflets de lumière.

On aime : l’harmonie qui se dégage de cet accrochage d’œuvres témoignant d’une attention particulière au passage du temps et à l’observation de la nature : Concrétion d’étincelles d’acier carboné et toiles de store s’apparentant à des tableaux abstraits de Clément Borderie, bouquets de mimosas fanés dans leur linceul pâle de Victoire Inchauspé (How many dreams, how many doubts, 2024), et ces tableaux sculptures de Julia Rometti, comme des fenêtres ouvrant sur le soleil.

6. Edgar Sarin – Nouvelles œuvres

📍 Michel Rein

42 rue de Turenne, Paris 3e

Jusqu’au 20 juillet 2024

Pourquoi il faut y aller : La première monographie d’Edgar Sarin, tout juste publiée, signale que cet artiste autodidacte, actif depuis plus de dix ans, bénéficie désormais d’une solide reconnaissance critique. L’an dernier, deux de ses œuvres ont intégré le Centre Pompidou, musée national d’art moderne. C’est son « moment » et sa cinquième exposition à la galerie.

Ce qu’on y voit : des œuvres récentes et d’autres moins. Si ce sont d’abord à ses sculptures aux formes archétypales que l’on identifie l’artiste, celui-ci a révélé en 2021 sa pratique de peintre, d’abord à travers des petits formats. Ici, il s’agit de toiles de grandes dimensions, très gestuelles. Enfin l’exposition présente un nouvel ensemble de vitraux.

On aime : l’inventivité permanente qui sous-tend la pratique prolifique d’Edgar Sarin (par exemple quand il décide, au Japon, de créer des vitraux à partir de carrés d’algues Nori déshydratées) et la spontanéité décomplexée de ses peintures ou de sa collecte de formes, puisant dans les répertoires disponibles. La vitalité l’emporte.

7. Palmarès

📍 Julie Caredda

4 rue de Miromesnil, Paris 8e

Jusqu’au 26 juillet 2024

Pourquoi il faut y aller : Palmarès est un accrochage collectif curaté par Joséphine Dupuy Chavanat, responsable des projets artistiques du groupe immobilier Emerige (notamment en charge de la gestion de sa collection d’art contemporain et du futur centre d’art dédié à la création contemporain sur l’Île Seguin). Cette exposition offre un aperçu de sa vision de la scène française et de son sens de la scénographie.

Ce qu’on y voit : des œuvres accrochées au mur par des rubans à la façon de médailles. À quelques jours du début des JO de Paris 2024, l’exposition prend en effet pour point de départ les valeurs de la compétition pour les mettre en question.

On aime : le principe d’un exercice de style très contraint en écho à une communication de masse, et la diversité des créations qui en résultent. Presque tous les artistes adoptent un point de vue critique, avec plus ou moins de bonheur sur le plan formel. Mention spéciale pour la médaille en chocolat conceptuelle d’Ismael Bazri, la sculpture miniature en grès et en étain d’Hermine Bourdin, la marqueterie de marbre ironique d’Alice Guittard, les chatoyantes peintures à l’aquarelle de Louis Verret … À vous de jouer.

8. Ultimus Spectaculi

📍 PRAZ-DELAVALLADE

5 rue des Haudriettes, Paris 3e

Jusqu’au 13 juillet 2024

La galerie Praz-Delavallade ferme le 13 juillet avec un accrochage collectif qui rassemble une vingtaine de ses artistes (Soufiane Ababri, Pauline Bazignan, Sepand Danesh, Thomas Fougeirol, Maude Maris, Diogo Pimentão, Brett Cody Rogers …) autour du thème de la rupture.  Cette exposition de groupe clôture plus de trente ans d’activité. Installée depuis près de quinze ans dans le Marais, la galerie y montrait notamment des artistes de Los Angeles (comme Matthew Brandt, Sam Durant, Chris Hood, Nathan Mabry, Joe Reihsen, ou Marnie Weber…). La scène artistique de LA, ainsi que des attaches familiales, avait conduit le duo à séjourner régulièrement dans la ville puis à y ouvrir une antenne en 2016, dans le quartier des musées, créant ainsi les passerelles entre Paris et la Californie, où il présentait entre autres des artistes européens, dont quelques Français (tels Pierre Ardouvin ou Philippe Decrauzat).